Bombe textile
Quel rapport y a-t-il entre un discret graphiste textile de la première moitié du XXe siècle et un artiste plasticien d'aujourd'hui qui enchaîne les créations toutes plus ludiques les unes que les autres ? Le passage piéton, bien sûr !
Marcel Lerdung est né en 1894 dans une Alsace alors sous domination allemande. Ce que je peux savoir de lui sans bouger de mon salon est plutôt sommaire et donne à croire qu'il n'aurait jamais quitté son village natal de Luttenbach, où il s'est marié en 1923 et où il est mort en 1969. Et c'est là, encore, que se trouve l'atelier de dessin industriel dans lequel il s'associe en 1926 avec deux autres dessinateurs, Paul Latscha et Xavier Albisser.
Il créa pour l'industrie textile, il commercialisa également des toiles poncées avec ses dessins et destinées à être brodées pour devenir linge de maison. Il subsiste à peine en ligne une image de piètre qualité publiée lors de la vente, en 2002, d'un lot de ses dessins d'études pour des tissus fleuris. Il faut que je pense à m'enquérir de lui lors d'une prochaine visite au Musée de l'Impression sur Étoffes ; là, c'est sûr, on doit garder son souvenir.
Mulhouse, c'est aussi la ville où Pierre Fraenkel, qui a installé son atelier dans le quartier DMC, sème par les rues ses piquants messages et ses graphismes souvent inspirés de l'histoire locale.
Cette fois-ci, il a enjolivé un passage protégé se trouvant justement à l'angle du musée, en bombant entre ses bandes blanches un motif textile créé par Marcel Lerdung. En même temps qu'il pose une touche de fantaisie sur l'asphalte de la ville, ce dégradé de bleus a le mérite de ramener sous nos yeux un graphiste un peu oublié.
Pierre Fraenkel le fait de multiples manières, par exemple en utilisant encore un des dessins de Marcel Lerdung pour les voeux de la région Grand-Est...
... ou en projection sur le viaduc ferroviaire d'Urbès.
Je profite de l'occasion pour vous signaler la bonne adresse si vous vous trouvez à Mulhouse pour une visite du Musée de l'Impression sur Étoffes. Ne cherchez pas ailleurs pour déjeuner, vous mangerez une délicieuse cuisine de ménage dans le cadre sympathique et verdoyant du Sinclair qui se trouve à vingt mètres du passage piéton, et par conséquent à deux pas du musée.