Les anonymes de l'été {7}
Mon septième et dernier anonyme pour cette série est un travail de reprises. Mais quel travail ! Il sort incontestablement le raccommodage de la sphère utilitaire pour en faire un embellissement d'un raffinement presque magique.
Ce reprisoir me pose un problème qui n'est pas nouveau : je crains fort de ne pas parvenir à vous restituer son impalpable finesse. Il a été brodé sur une toile qui titre 28 fils au centimètre et il mesure 25 centimètres de large sur 29 centimètres de haut, ce qui est tout petit pour la multitude d'exercices qu'il présente.
La couronne du centre, dans laquelle Mademoiselle ER a brodé ses initiales au point compté, fait tout juste 4 centimètres de large.
Il est structuré autour de groupes d'exercices assez différents les uns des autres et tout d'abord les classiques reprises brodées. Classiques... si on peut dire, car il ne s'agit pas de ces travaux d'imitation un peu factices où on se contente de reproduire différentes armures en lançant les fils sur le support d'une toile toujours présente. Ici la reprise est bel et bien effectuée pour remplacer une toile disparue, ce qui est bien plus sportif !
C'est si finement exécuté que j'ai même eu du mal à réaliser l'absence du support ; il m'a vraiment fallu examiner l'ouvrage par transparence en essayant de comprendre comment le travail était structuré. On le voit un peu mieux sur les deuxième et troisième reprises du groupe qui suit où la disparition des fils de la toile n'est que partielle.
Car effectivement, dans la reprise du milieu, les fils verticaux ont disparu uniquement sous les rayures dorées qui sont brodées sur les fils horizontaux subsistant. Et c'est la même chose pour la reprise à carreaux rouges et blancs : ce sont les fils de la toile qui forment les carreaux blancs, mais ils ont été retirés sous les lignes rouges, aussi bien horizontalement que verticalement.
Bref, même pour ce travail dont on a vu de multiples exemples sur d'autres ouvrages, le regarder de près pour chercher à le comprendre donne déjà un peu le tournis. Alors pour les reprises en dentelle qui suivent, j'ai lâché l'affaire... Je n'arrive pas à déterminer comment, mais je suis presque sure que le fond de tulle a été reconstitué à l'aiguille par la brodeuse elle-même et non pas rapporté au préalable.
Après ça, je dirais presque "fastoche" pour les boutonnières brodées :
Mais je me reprends un gros coup de bambou sur le travail de blocage des fentes qui encadrent l'ouvrage. Dire que quand j'ai fait des essais de renfort par de simples abeilles, j'en ai raté la moitié...
Mademoiselle ER, je ne saurais vous dire à quel point je suis confondue par votre extraordinaire maestria. Sachez que presque deux siècles après, je suis toujours pâmée d'admiration devant votre merveilleux reprisoir. Et je suis prête à parier que je ne suis pas la seule...
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