Juliette vendait de tout
L'été puis ces vacances prolongées en septembre furent, comme il se doit, emplis de petits riens à la saveur d'éternité : flânerie mercière, glane aux fruits sauvages, promenades sur la piste d'une maison rêvée (fantasmée ?), pique-niques face au soleil couchant, découverte d'une jolie adresse, retrouvailles avec la brocante, tablées amicales, tentatives boulangères, tricotage (et moult détricotage), lectures réjouissantes…
Et surtout, beaucoup de paresse ! Avec tout de même un peu de bricolage entre amies, celui qui motive à avancer : j'ai enfin terminé une boîte qui me tenait à cœur car elle est dédiée à mon arrière-arrière-grand-mère Juliette qui, avant d'y faire la mercière, tint à Creil un commerce de tout. Il y avait même quelques tables où elle servait à boire et, derrière la boutique, une salle où elle pouvait faire danser le monde.
Commencée il y a quelques années en compagnie d'Hélène Chalendard-Chireux, avec ses bons conseils et sur un de ses modèles, cette boîte était restée en plan depuis. Un projet chassant l'autre, je repoussais toujours à plus tard les quelques points de broderie nécessaires à sa finition.
A force de m'en désoler, j'ai résolu d'arrêter de chougner et de me mettre au boulot ; ce qui, je le confirme, est bien plus efficace :-)
Il y avait pas mal de technique dans cette boîte à l'astucieuse construction et c'est ce qui est toujours intéressant dans les stages d'Hélène : la découpe et l'habillage des festons, la charnière, le plateau qui révèle un second logement, le tiroir en partie basse…
A l'intérieur du couvercle, j'ai incrusté une copie en réduction d'un grand portrait de Juliette. Il a été bien malmené pendant la guerre mais je l'aime aussi pour ses blessures. La légende familiale raconte que les allemands avaient réquisitionné la maison pour en faire des bureaux mais que Juliette la têtue n'avait pas voulu déguerpir : cette maison gagnée sur les marais au début du siècle était le rêve d'une vie. Elle resta donc cantonnée avec son Eugène à la cuisine et au bureau. Les intrus avaient fait dégringoler à la cave, sans trop de ménagement, ce qui les encombrait dans les pièces qu'ils avaient annexées… dont les deux cadres contenant les portraits des maîtres de céans, qui gagnèrent quelques éraflures dans l'aventure.
A l'intérieur de la partie haute, le plateau repose sur quatre contreforts le long desquels s'inscrit la vie de Juliette en quelques dates essentielles, celles des trois actes chers aux généalogistes. C'est justement cette broderie-là que j'ai tant tardé à terminer.
Pour le décor du dessus, je me suis concentrée sur la mercerie qui constituait une part importante du multi-commerce. J'ai utilisé encore une fois le papier comme support, en brodant sur une page prélevée dans un vieux cahier d'atelier ; je l'ai ensuite agrémentée de plein de bricoles utiles à la couturière : boutons, anneaux, incrustations et rubans…
Voilà où Juliette tenait son commerce, entourée du petit monde qui a constitué son voisinage pendant douze ans.
En parlant de commerce, nous avons une énigme en plan… qui n'a pas du tout fait recette pour le moment ;-) Je vous laisse une semaine supplémentaire pour plancher dessus, si vous en avez envie ? Dimanche prochain, je vous donnerai les réponses, et surtout la méthode pour les obtenir.