L'Oreiller du blessé
Au début de l'année, le musée d'histoire de Nantes a organisé une exposition retraçant l'expérience quotidienne des enfants pendant les difficiles années 1914-1918. Intitulée A l'École de la guerre, cette exposition s'appuyait sur les rapports de fonctionnement rédigés par les directeurs des écoles publiques de la ville pour raconter le conflit vu par les enfants.
Ecole de filles - rue Emile-Péhant - La salle de couture 1917-1918
Faute de pouvoir la visiter, je viens de récupérer grâce à une collègue nantaise le catalogue édité à cette occasion. Sur la base d'une abondante iconographie constituée de documents d'époque, de photographies et de dessins d'enfants, il aborde la vie à l'arrière sous un angle inhabituel et riche d'enseignements. Je vous livre telle quelle une des anecdotes qu'il relate.
Ecole de filles - groupe d'élève à la couture - 1917-1918
"Parmi les nombreuses œuvres auxquelles participèrent les écoles nantaises, deux ont pris une ampleur nationale : l'œuvre du Couvre-pieds du soldat, créée le 1er octobre 1914, et celle de l'Oreiller du blessé, créée le 1er février 1915 par Madame Einholtz, directrice de l'école de filles de la place des Garennes, et Madame Buffet.
L'œuvre de l'Oreiller du blessé avait pour but de doter les trains sanitaires, chargés d'évacuer les blessés de la ligne de front aux hôpitaux, d'oreillers moelleux, propres, désinfectés, susceptibles d'être placés et déplacés facilement. Ces oreillers devaient éviter aux blessés de ressentir les secousses inévitables du transport et apaiser leurs douleurs.
Au 15 avril 1917, deux mille cent couvre-pieds avaient été réalisés pour les hôpitaux militaires et vingt mille oreillers livrés dans les ambulances du front et les gares régulatrices. Cette œuvre, née dans une école nantaise, fut reconnue et soutenue non seulement en France, mais aussi en Angleterre et en Amérique.
En mars 1919, la guerre terminée, Madame Einholtz reçut l'accord officiel du ministère de l'Intérieur pour poursuivre son action. L'Oreiller du blessé devint ainsi l'Aide aux foyers détruits. Les filles commencèrent alors à coudre trousseaux et layettes pour les familles des régions dévastées."
Ecole de filles - groupe d'élève repassant des chemises de soldats - 1914-1917
Les enfants des écoles préparant des oreillers tout doux pour tenter d'alléger la misère des soldats blessés, c'est tout simplement le détail qui compte. Et moi ça me fait fondre, vous me trouvez trop sentimentale ? C'est probablement l'histoire vue par le tout petit bout de la lorgnette, mais finalement ce sont bien ces récits mis bout à bout qui nous font toucher du doigt la réalité de la guerre et donnent tout son sens à cette commémoration.
Les images illustrant ce billet sont issues du passionnant catalogue de l'exposition A l'école de la guerre 1914-1918, réalisé par le musée d'histoire de Nantes et les archives municipales de Nantes (Les Éditions château des ducs de Bretagne), vendu au prix de 15 €.