Merci, Sue !
Contre toute attente, le déclic que j'évoquais la semaine dernière s'est manifesté du côté de la broderie. L'après-midi passé samedi à la campagne n'y est sans doute pas pour rien : les jolies heures à admirer les merveilles d'Annie, l'exceptionnelle bande de couture qu'elle m'a confiée pour que je vous la montre, les bavardages autour de l'aiguille... J'étais déjà bien mure, tout ceci a achevé de me faire dégringoler de l'arbre.
L'an dernier, j'étais passée à côté du Community Stitch Challenge organisé par TextileArtist.org lorsque les premiers confinements ont commencé à se répandre comme une traînée de poudre tout autour du globe. J'étais de mon côté trop absorbée dans le boulot à ce moment-là pour avoir l'esprit libre, avec ces journées qui se dilataient sous l'effet du télétravail. J'ai tout de même suivi avec envie et admiration les productions des unes et des autres, en regrettant cette occasion manquée. Je me disais que je serais toujours à temps de m'y mettre dans une période plus sereine mais c'est typiquement le genre de projet auquel l'avancée avec la communauté donne tout son sens ; par la suite, je n'ai pas été motivée à reprendre l'aventure en solitaire
J'avais vu dans la semaine que l'aventure redémarrait pour une édition 2021 avec un premier atelier proposé par Sue Stone. Cette fois-ci je bouillais trop ! En rentrant à la maison samedi soir, saisie par l'urgence de m'y mettre, j'ai regardé la vidéo enregistrée par Sue et téléchargé son cahier d'atelier. Il n'était plus question de temporiser d'autant que je savais déjà sur quoi je voulais travailler : je me suis scotchée à mon projet sans me laisser distraire par rien d'autre pour tout le temps qui me restait sur le week-end.
J'ai tout de même été bonne élève et suivi la démarche proposée par Sue : rechercher l'inspiration, dessiner, composer, broder. Pour la première étape, je n'ai eu qu'à réunir le matériel car j'avais déjà décidé de partir d'une photo de ma mère, canotant sur la Marne à la Ferté-sous-Jouarre. J'adore ce portrait saisi par mon père à l'époque de leur rencontre. Le support s'est imposé dans la foulée : je broderais sur ses chemises à lui, mises de côtés et découpées dans l'idée d'en faire un patchwork-souvenir, un jour. Oui, le patchwork je le ferai peut-être... un jour :-)
Même pas peur ! C'est le bienfait de ces ateliers qui sont assez libérateurs et pendant lesquels il ne faut se préoccuper que de son envie, sans se laisser freiner par ses limites. Parce que l'étape suivante, c'était chaud pour moi : je passe mon temps à regretter d'être une tanche en dessin sans jamais avoir le courage de mobiliser les moyens nécessaires pour apprendre ; j'allais donc me retrouver confrontée à ma propre nonchalance et à mes multiples velléités.
Je fusionne les deux étapes suivantes en une seule : dessiner et composer. J'ai suivi avec bonheur la régle des trois tiers suggérée par Sue, ce qui m'a permis assez rapidement de déterminer mon format, multiple de carrés de sept centimètres. Ma Maman, qui m'a toujours tout pardonné, me pardonnera bien encore ce forfait-là car évidemment, personne l'ayant connue ne pourrait la retrouver dans mon dessin. Mais je savais dès le départ qu'il en serait ainsi et j'avais résolu de ne pas me laisser abattre : dans ma tête c'est tellement elle que j'ai brodée qu'il doit bien finir par y avoir quand même quelque chose d'elle dans mon projet (et hop ! admirez la pirouette :-)
Une fois passé ce mauvais moment, le reste n'a été que du plaisir. Samedi soir j'avais déjà reporté mon dessin et jeté mes premiers points sur la toile. Dimanche aux aurores, j'étais sur mon aiguille. J'ai dormi mais tout juste, si ça se trouve j'en ai aussi rêvé.
Je m'étais fixé le défi supplémentaire de prendre les choses comme elles venaient et de ne rien rectifier (gros challenge pour moi). Je me suis donc arrêtée à deux points simplissimes, le point de tige fendu pour les contours et le point avant pour les remplissages. Bon choix car je me suis régalée et cette histoire de rester sur le premier jet, ça aussi c'est libérateur.
J'ai quand même choisi un fil trop foncé pour broder le visage. Mais comme je ne pouvais pas défaire et repartir avec un fil plus doux, j'ai cassé la dureté du profil en lui superposant un lambeau de tulle, avec l'autre avantage de voiler un peu mon étrange dessin. Pour le reste, j'aime de plus en plus utiliser ces points de reprise comme je l'avais déjà fait pour l'exercice du cahier consacré au ravaudage. C'est assez obsessionnel mais justement, il n'y a pas besoin de réfléchir et ça tombe toujours bien.
Je reviendrai à la mignonnerie, c'est sûr. Un indice : j'ai tout de même réussi à balancer un monogramme de Saint-Gall dans mon bazar, même si je l'ai bien surchargé en tentant de noyer sa précieuse blancheur. Mais pour le moment, je suis passée à l'atelier de la seconde semaine, celui de Merill Comeau. Comme elle nous propose de travailler sur les mots, je suis censée être davantage dans mon élément... et pourtant je suis encore partie sur du grand n'importe quoi :-)
En tout cas, c'est un tel bonheur de triturer ainsi du tissu juste à la poursuite d'une idée en se retirant de la tête l'objectif de faire joli, c'est une telle chance d'être accompagnée par des artistes si inspirantes, que je ne saurais trop vous inciter à rejoindre le Community Stitch Challenge 2021. Pour l'anglais, pas de souci, il y a plein d'images suffisamment explicites. Au début j'ai regretté de ne pas avoir le sous-titrage français sur les vidéos mais finalement ce n'est pas plus mal : je me suis laissé bercer par la musique des mots et si j'ai raté une consigne ici ou là, ce n'est pas bien grave !