Machine à coudre {7} Les belles images
Étiquettes, affiches, chromos publicitaires, cartes-photos, éphémères de toutes sortes… s'il y a un objet du quotidien qui fit les beaux jours de l'iconographie populaire, c'est bien la machine à coudre.
Je commence par une image un peu hors champ mais à défaut d'être la plus flatteuse, elle est la première, peut-être la plus touchante et en tout cas la plus emblématique : les croquis techniques joints par Barthélémy Thimonnier aux brevets qu'il déposa, entre 1830 et 1848, pour son métier à coudre au point de chaînette.
Brevet 1BB1825 - INPI
Le Petit Français Illustré du 19 septembre 1891 – Gallica
Malheureusement pour lui, il n'avait pas assez la bosse du commerce pour tirer parti de sa découverte et termina dans la misère, laissant à d'autres le soin de récolter les fruits de cette toute nouvelle technique. Mais il n'en demeure pas moins l'inventeur de la première couseuse mécanique.
Et elle se propage à une vitesse impressionnante ; la fin du siècle n'est pas arrivée que huit foyers sur dix sont déjà équipés de leur machine à coudre, ce que ne manquent pas d'exploiter les filateurs lillois pour habiller leur production.
Étiquettes de fil de lin – Bibliothèque Municipale de Lille
De nouveaux métiers émergent en ce XIXe siècle où l'industrie triomphe : les hommes deviennent piqueurs à la mécanique et les femmes mécaniciennes, comme en témoigne cette superbe primata trouvée dans les registres du tribunal de commerce de Paris. Surfant sur la vague du progrès, Eugène Dotte dépose, dès le 30 décembre 1863, cette étiquette À la Mécanicienne qui habillera désormais ses fils de soie.
Il y eut pourtant bien des résistances à la mécanisation car le monde ouvrier pressentait déjà la pression et les cadences aliénantes qu'allait lui faire subir la concentration du travail. Contrairement à l'image idyllique croquée sur l'étiquette de Dotte, elles ne portaient certainement pas de jolis jupons en broderie anglaise, nos ancêtres mécaniciennes piquant inlassablement dans le bruit et la poussière des ateliers industriels, pour y gagner à peine de quoi survivre.
À l'opposé pourtant, c'est l'image d'une machine à coudre aimée et bichonnée que nous montrent les cartes photos des petits ateliers, des ouvroirs et des familles. Quand le photographe ambulant passe dans les villages pour proposer ses services, on sort la machine à la lumière du dehors pour la mettre en vedette au cœur du petit groupe de couturières.
Et pour finir sur une note de mignonnerie, voici une machine à coudre cachée dans l'écrin d'une chromo à système, ma chouchoute parmi mes images préférées ;-) Il faut l'ouvrir pour découvrir le raffinement de son gaufrage et de ses découpages sophistiqués.
Que tous tes jours filés
Par la main des plaisirs
Surpassent en bonheur
Mes vœux et mes désirs.