Cahiers irlandais
Je viens de voir une nouvelle fois passer sur Facebook l'image du spectaculaire cahier de Sarah Darby, et je me suis dit à cette occasion que tous ces beaux recueils de couture irlandais pouvaient nous inspirer pour notre ouvrage 2019.
Les deux images que je vous montre tout d'abord sont les seules que j'ai jamais trouvées du cahier de couture de Sarah, malheureusement ; il fut vendu aux enchères en 2006 à l'initiative de la regrettée Joy Jarrett dont le magasin d'antiquités à Witney renferme des pépites. Je vous parlerai un jour d'une inoubliable visite chez elle, à l'occasion d'une de nos balades dans les Cotswolds, et de l'étourdissante pièce noire où elle conservait des samplers tous plus extraordinaires les uns que les autres.
Sarah élabore son cahier en 1837 à la Female Model School de Kildare Place, à Dublin ; elle nous donne ainsi à admirer un exemple de vêtements en miniature constituant une sorte de chef-d'oeuvre sur les plis et les fronces. Si vous êtes intéressée à en savoir un peu plus sur ce qu'on enseignait à ces jeunes demoiselles, l'université de l'Illinois a mis en ligne une version numérique du programme sur les travaux d'aiguilles tel qu'il était appliqué par cette école en 1833, c'est-à-dire à une période très proche de celle où y étudiait Sarah.
C'est d'Irlande, toujours, que provient le cahier d'Ellen Mahon conservé au musée de l'enfance de Bethnal Green, à Londres... un autre beau souvenir de visite. Elle le réalise entre 1852 et 1854 à la Boyle School, ainsi qu'elle la dénomme sur deux de ses ouvrages ; voilà qui nous renvoie probablement à la Collegiate School située à Celbridge, dont Anne Boyle fut directrice de 1851 à 1859, comme plusieurs Boyle avant elle. Cette école était connue pour servir de vivier à l'enseignement protestant et le fournir en professeures de toutes sortes.
Je laisse parler les images de ce cahier, que le V&A nous offre de consulter dans une définition assez remarquable pour que nous puissions en apprécier à loisir chaque détail.
Le prochain cahier est celui de Dorothy Tyrell ; elle l'élabore en 1832, elle aussi à l'école de Kildare Place. A cinq ans d'écart, elle nous offre donc à voir ce qui nous échappe dans le recueil de Sarah, faute d'iconographie suffisante.
Celui de Dorothy, intégré à une collection privée, a heureusement été présenté au public en 2015 lors d'une exposition organisée par l'Art Institute of Chicago. Il est un exemple supplémentaire de cette sorte de passage obligé dans l'éducation des jeunes filles irlandaises : constituer un recueil de modèles en miniature auxquels elles pourront se référer dans la tenue de leur ménage ou au long de leur carrière d'enseignante.
Reprises, couture, tricot, point de marque... les thèmes mis en avant par ces cahiers ne vous évoquent-ils pas quelque chose ? Pour compléter ce florilège, je vous reparlerai certainement cahiers de vacances, cet été comme l'an passé. Car j'ai encore à vous montrer des réalisations de tous niveaux ; mais que la jeune couturière ait été experte au maniement de l'aiguille ou bien plus empruntée, elles sont toujours touchantes.
Et remplies de jolies idées à piquer pour nos futures pages, n'est-il pas ?